N° 302 - Avril 2005
ISSN : 1141-7137
Depuis une vingtaine d'années, l'Asie du Sud-Est a vu se multiplier les travaux archéologiques de terrain. L'intérêt manifesté par les chercheurs vient en grande partie de la situation de la région, diverse et complexe à plusieurs échelles dès les temps anciens, carrefour entre les mondes chinois, indien et l'Insulinde, le continent et les îles. La fin des conflits régionaux explique aussi, en partie, les nombreuses fouilles menées souvent en coopération avec des équipes étrangères. La part prise par les chercheurs français, du C.N.R.S., de l'I.R.D. ou de l'E.F.E.O., avec le plus souvent le concours du Ministère des Affaires Étrangères, en collaboration avec les archéologues locaux, est loin d'être négligeable. Grâce, entre autres, à ces travaux, il est désormais possible de proposer un tableau cohérent des époques Pré- et Protohistoriques. Bien fourni et très varié ce dossier demeure un reflet partiel de la diversité archéologique sud-est asiatique. Encore mystérieuse et complexe l'Asie du Sud-Est dévoile peu à peu le secret des origines des hommes et des civilisations grâce aux efforts conjoints des membres des institutions scientifiques françaises qui travaillent en étroite collaboration avec leurs collègues locaux.
Patiemment reconstituée par un siècle d'études basées principalement sur l'épigraphie et l'étude architecturale et stylistique des vestiges monumentaux, l'Histoire fait naître la région d'Angkor vers la fin du VIIIe siècle, au hasard des pérégrinations d'un jeune prince, Jayavarman II, qui règne brièvement à Hariharâlaya, cité qui a été identifiée avec la zone de Roluos, à une dizaine de kilomètres au sud-est d'Angkor. Jayavarman II poursuit sa route qui aboutit à libérer de la tutelle du roi de ?Java? puis à unifier un pays divisé appelé alors Tchen-la dans les annales chinoises. Puis il revient s'installer définitivement à Hariharâlaya, après s'être fait sacrer ?souverain universel? au sommet du Phnom Kulen en 802. Avec lui commence officiellement la période angkorienne. Et après lui, tous les souverains demeureront dans la région d'Angkor jusqu'à son abandon au XVe siècle, hormis une petite infidélité d'une vingtaine d'années de Jayavarman IV vers Koh Ker, un site situé à une soixantaine de kilomètres au nord-est. Jayavarman II apparaît donc non seulement comme le premier ?roi suprême? à régner à Angkor, mais aussi et surtout peut-être comme le créateur de la royauté angkorienne, de sa titulature, de certains de ses cultes qui perdureront lors des règnes suivants.
Auteur : Pottier (Ch.)
Magazine : Dossiers d'Archéologie n° 302 Page : 82-87